– Les amours d’Angélique – 
par Abraham Ravaud


Introduction :

‘L’ANGELIQUE‘ du sieur de REMY est paru en 1626 chez A. de Sommaville (481 pages).

En introduction, Abraham Ravaud présente son livre comme son premier essai, qu’il dédie à Madame de Gravelle. Il souhaite par cet ouvrage lui faire connaître les effets de l’amour dans les âmes des hommes. Il est vrai qu’il a 26 ans quand l’ouvrage est mis sous presse et que Madame de Gravelle en a 27.

Madame de Gravelle :

Marie Créton d’Estroumel est née en 1598. Elle est la fille d’un gouverneur de Péronne. Il avait participé à la bataille de Senlis.

La Maison d’ESTOURMEL, dit CRETON, porte: de gueules à la croix dentelée d’argent.

Si on en croit Tallemant des Réaux, Madame de Gravelle était très attirante et eut des liaisons avec plusieurs personnages de haut rang : le maréchal d’Ornano, le marquis de Rosny et le maréchal de Bassompierre. Cette liaison avec Bassompierre, de vingt ans son aîné, s’est nouée lorsqu’ils étaient tous deux enfermés à la Bastille. Madame de Gravelle avait été arrêtée sur ordre de Richelieu suite à des intrigues, et avait été soumise à la question (à la torture).

Extrait:
Quand il fut dans la Bastille, il fit vœu de ne se point raser qu’il n’en fût dehors; il se fit faire le poil pourtant au bout d’un an. Il y eut quelque petite amourette avec madame de Gravelle, qui y étoit prisonnière. Cette femme avoit été entretenue par le marquis de Rosny. Depuis, pour ses intrigues, elle avoit été arrêtée. Le cardinal de Richelieu avoit eu l’inhumanité de lui faire donner la question. Après la mort du maréchal, elle fut si sotte que de prendre un bandeau de veuve, aussi bien que madame de Bassompierre.


Premier essai ?

Pourquoi A.Ravaud présente l’ouvrage comme son premier essai alors qu’il a déjà publié plusieurs fois ? Soit il s’agit d’une coquetterie d’auteur, soit l’ouvrage est publié quelques années après sa rédaction.


L’environnement géographique et historique de l’histoire :

A.Ravaud raconte deux histoires d’amour dont les cours s’entrecroisent. Au travers de ce roman, dont le cadre est la mer Méditerranée avec la Sardaigne, la Corse, la Sicile et la Tunisie, on perçoit quelques caractéristiques de la vie du XVIIème siècle. Les pirates tunisiens qui capturent des navires européens en difficulté pour en faire des esclaves ; les harems des princes turco-arabes, la relative liberté que les chrétiens peuvent conquérir sur place ; les confits entre ces petits pays sont typiques. A cette époque un ordre chrétien avait même été créé spécifiquement pour venir en aide aux chrétiens capturés par les Arabes (l’ordre des Trinitaires).

Le récit :

Angélique est une princesse sarde qui au début de l’histoire vient de vivre un naufrage sur les côtes tunisiennes.

Elle pense être la seule survivante de ce désastre, quand elle croit voir de l’autre coté d’un fleuve l’homme dont elle est amoureuse, emmené au supplice par des soldats et suivi par la foule. L’échafaud est dressé sur la plage.

Mérindor, c’est le nom de son amoureux, était avec elle dans le bateau qui a fait naufrage. L’amour était réciproque. Le condamné est décapité et elle regrette de ne pouvoir l’accompagner dans la mort.

Le corps est jeté dans le fleuve. Angélique cherche à lui donner une sépulture et rejoint le corps sur une île du fleuve. Elle creuse la tombe quand deux sauvages arrivent et tentent de profiter de la situation. Cependant, ils se disputent et le plus jeune se débarrasse de son compagnon et retourne vers la jeune fille. Calirie, une jeune européenne, alertée par les pleurs et les gémissements d’Angélique vient la sauver.

Les deux demoiselles font connaissance et Calirie raconte à Angélique sa propre histoire. Elle aussi est coupée de ses racines, vit bien des malheurs en Afrique et raconte son histoire.

Il y a environ trois ans, elle a appris que ses parents n’étaient pas ses vrais parents, que toute jeune elle leur avait été confié et qu’elle était probablement de sang noble. Ayant rencontré Hérmogène et noué des liens tendres avec lui, elle quitte son île pour le plaisir de sa compagnie mais aussi pour essayer de retrouver ses parents dont elle a conservé quelques reliques. Elle habite quelque temps en Sardaigne accueillie par la famille d’Hermogène.

Cependant, celui-ci est élu Amiral de flotte sarde en prévision d’un conflit avec les siciliens. Un mois après que la flotte eut quitté le port, elle apprend atterrée la défaite des navires sardes et la mort de l’amiral, son ami Hermogène.

Calirie, part toutefois vers les lieux de la bataille et apprend qu’Hermogène serait prisonnier à Syracuse. Elle est capturée par des corsaires et immédiatement acheté par l’amiral sicilien victorieux. Celui-ci ne tarde pas a être très amoureux mais reste éconduit malgré ses efforts. Elle s’échappe grâce à la complicité d’une esclave qui dirige l’organisation du palais, mais elle est finalement reconnue malgré son déguisement et conduite à la prison. Contrainte d’avouer un meurtre qui a eu lieu pendant son évasion, assassinat qu’elle n’a pas commis elle est condamnée au supplice.

A cet instant du récit de Calirie, voici que Mérindor réapparaît sur la rive ! Angélique se précipite vers lui. Les retrouvailles sont émouvantes.

Grâce à ses explications, elle comprend que l’homme qu’elle a vu décapiter sur la plage portait les habits du naufragé et qu’il venait d’être condamné à la suite d’une violente rixe dans le port de Tunis. Après dix jours d’enfermement, Mérindor est parvenu à ‘filer à l’anglaise’ et à quitter la ville. Merindor raconte incidemment qu’il a croisé parmi les esclaves Hermogène. Calirie l’entend et après avoir tant désespérée de revoir son amoureux un jour, se précipite vers la ville.

Mérindor et Angélique sont accueillis par une fille de compatriotes émigrés en Tunisie et qui est devenue la prétresse d’un temple.

Pendant ce temps, le roi de Sardaigne, le père d’Angèlique croit que sa fille a été enlevée et cherche à se venger de Mérindor et de son père le roi de Corse. Cependant, dans le pays, des intrigues, des trahisons et des projets de révoltes existent. L’enlévement d’Angélique fait déraisonner, le roi, son père. C’est le bon moment, se disent les comploteurs. L’affaire est découverte à temps et le principal conspirateur arrété.

Calirie est abusé par les maléfices d’un mage qui lui fait croire qu’Hermogène est mort et qu’il l’a trahie.

Malgré cela Calirie retrouve Hermogène qui avait été rameur pendant deux ans.

Le récit revient alors sur les raisons qui ont amené Mérindor et Angélique à fuir le royaume sarde. Ils ont vécu une partie de leur jeunesse ensemble, mais ont été séparés. De nombreux conflits entre Sicile, Sardaigne et Corse ont précédé leur rapprochement. Mérindor était venu discrètement en Sardaigne, et pour retrouver sa belle, remporte un tournoi et reçoit après avoir relevé la visière de son casque un diamant des mains d’Angélique. La crainte d’une vengeance les a amenés à quitter brutalement la Sardaigne.

Merlindor et Angélique, Hermogène et Calirie naviguent vers cette île quand ils sont interceptés par des corsaires et dirigé vers Clionnée. En arrivant au palais du roi local, Calirie retrouve l’esclave qui l’avait aidé à fuir la Sicile deux ans plus tôt. Dans l’effusion de ces retrouvailles, les reliques qu’avaient conservées Calirie de sa prime enfance sont apercues par la reine qui reconnaît sa propre fille. Cette reine avait été obligée il y a bien des années de retirer sa fille du palais et l’avait perdu de vue.

Le livre se termine par des fêtes de retrouvailles après que le père d’Angélique eut pardonné Mélindor et par un double mariage.

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